On a vu ces derniers temps passer dans l’actualité des images d’animaux maltraités dans des abattoirs révélées par l’association L214. Notamment celle d’un agneau accidentellement écartelé vivant. Ces scandales entraînent la fermeture des abattoirs concernés pour inspection, puis leur réouverture. Ces images sont là pour remettre en cause les méthodes d’abattage entraînant stress et douleurs aigües chez les animaux. Au mieux, cela a pour conséquence plus de réglementation du traitement animal… jusqu’au prochain scandale. Les abattoirs ne sont que la partie émergée de l’iceberg. La traite des animaux a lieu tout au long de leur vie, de leur naissance à leur mort dans les élevages et les laboratoires. Avec toutes les règlementations en vigueur et le militantisme pour la cause animale, bien peu de choses ont changé dans la condition animale. Pour savoir si une protection animale plus efficace est possible, il est nécessaire de comprendre le cadre historique et idéologique dans lequel notre rapport à l’animal s’exerce. En premier lieu, nous verrons l’évolution de la place de l’animal dans notre société de l’époque moderne jusqu’à aujourd’hui de la thèse de l’animal machine jusqu’à l’exploitation moderne de l’animal en passant par la montée de l’affection pour les animaux. Dans un deuxième temps, nous nous intéresserons à la protection de l’animal en elle-même à travers les motifs anthropocentriques et ceux qui mettent l’animal au centre et nous verrons quels résultats ont été obtenus. Enfin, nous parlerons de la situation actuelle de l’exploitation animale et de ses conséquences sur le long terme.
a) Animal-machine
Si la situation de notre rapport à l’animal en est là où elle en est, c’est avant tout dû à la thèse de Descarte de l’animal machine. Selon cette thèse, développée dans Discours de la méthode, l’animal est un être dépourvu de raison que Dieu a créé sur le modèle des automates que nous connaissons mais dans une bien plus grande complexité et dont l’homme doit disposer. Cette thèse ne consiste pas à dire que l’animal est une machine, elle dit que l’animal doit être traité comme telle par l’homme qui doit se faire « maître et possesseur de la nature ». De cette thèse, les conséquences sont observables depuis le début du XIXème siècle jusqu’à aujourd’hui, notamment à travers la vivisection et l’expérimentation animale, mais aussi dans l’industrie agroalimentaire. Ce sont des points sur lesquels nous reviendrons. Au XIXème siècle il était impossible pour un étudiant en médecine d’échapper au spectacle de la vivisection. Ce thème est présent dans la Cinquième partie de Discours de la méthode où Descartes décrit l’expérience d’une dissection animale et nous décrit l’intérieur. Le corps de l’animal est censé nous en apprendre sur ses mécanismes, il faut pour se faire, regarder à l’intérieur comme on ouvrirait une machine pour voir comment elle est faite. Nous allons étudier l’évolution du rapport à l’animal au XIXème siècle. Dans la ville au XIXème siècle il est courant de croiser des animaux et d’en voir supporter des charges : chevaux, ânes, chiens, moutons, vaches. Les chevaux étaient particulièrement utilisés pour tirer des véhicules : charrettes, cabriolets, omnibus, ce qui en faisait des animaux des plus familiers. Ils étaient fréquemment battus et obligés de supporter des charges trop lourdes, si bien qu’il arrivait de les voir agoniser sur la route. Aucun intérêt n’était accordé à leur bien être et il était alors courant de voir des animaux faméliques dont le corps était déformé par les exercices physiques qu’on leur imposait. Les animaux de boucherie étaient abattus en ville dans des lieux où on pouvait aller et venir comme sur les marchés. Il arrivait qu’une bête à moitié égorgée se sauve et renverse tout sur son passage. Quand ils ne servaient pas un intérêt directement utilitaire, les animaux étaient employés comme divertissement dont l’exemple le plus connu est la tauromachie, mais aussi les combats de coqs. Tout cela bien sûr se faisait à la vue des enfants. L’animal au début du XIXème siècle était donc un objet d’exploitation, une matière première à disposition. L’animal lui-même n’intéressait pas, son bien-être n’importait pas. Son seul intérêt résidait dans les services qu’il pouvait rendre, par sa force de travail, sa chair ou encore pour le divertissement qu’il était susceptible d’offrir.
2 – La protection de l’animal
a) Des motifs anthropocentriques
b) Les motifs zoocentristes
La compassion envers les animaux pour eux-mêmes a émergé vers la fin du XIXème siècle. Le combat principal des protecteurs des animaux est la vivisection où les femmes sont en première ligne. Les journalistes Marie Huot et Frances Power Cobbe en sont les principaux exemples. Les moyens d’action des militants de la cause antivivisectionniste sont le dévoilement des activités cachées. Pour ce faire, certains militants et militantes s’inscrivent en faculté de médecine pour y tenir un carnet des cruautés faites aux animaux. La zoophilie (comprendre amour pour les bêtes en dehors de toute signification clinique et péjorative) se présente comme la forme la plus aboutie de l’humanisme. Ces motifs de protection animale peuvent se résumer en cette citation de Lamartine « on n’a pas deux cœurs, l’un pour l’homme, l’autre pour l’animal. On a du cœur ou on en a pas ». Emile Zola et Victor Hugo font partie des penseurs les plus influents de cette protection animale. Le poème d’Hugo Le Crapaud sert à faire passer l’idée partagée les militants de la protection animale que maltraiter un animal ce n’est pas seulement s’abaisser à la brutalité, c’est aussi nuire à une conscience. Ainsi, même la SPA instrumentalisera le registre de la sensibilité pour éduquer les hommes à plus de civilité entre eux. De la fin du XIXème au long du XXème siècle, le registre de la sensibilité n’en sera que croissant. La compassion pour les animaux étant indissociable de l’abolition partielle des hiérarchies entre espèces par les théories de l’évolution constitue la genèse de la mouvance antispéciste. Henry Salt était un des précurseurs à cette mouvance qui avait publié en 1892 Les droits de l’animal considérés dans leur rapport avec le progrès social. Bien plus tard, en 1975, Peter Singer publie La libération animale considérée aujourd’hui comme un œuvre majeure de l’antispécisme. Cependant, Singer est un philosophe utilitariste qui pense qu’on devrait donner une considération morale aux animaux sur des critères communs avec l’humain, il s’agit de l’intérêt à ne pas souffrir. L’aboutissement de l’antispécisme arrive en 1983 avec Les droits des animaux écrit par Tom Regan qui lui, considère l’animal comme un sujet de sa propre vie et insiste sur l’intérêt d’un être à vivre sa vie. Il s’oppose ainsi à l’utilitarisme de Singer car il considère que les « sujets-d’une-vie » possèdent des droits et que ceux-ci doivent-être respectés. En revanche, aucun d’entre eux ne voit un égalitarisme au sein des espèces animales dans leur droit à la vie. Ils ne remettent pas en cause le fait qu’un humain normal en bonne santé perd plus en mourant qu’un animal d’état comparable en matière de possibilité d’expériences de vie. Le registre émotionnel est un des motifs majeurs de notre époque de la protection des animaux auprès de la population. Il s’avère être le plus à même d’éduquer les masses dans plus de compassion envers son prochain. Cependant, le zoocentrisme a fait l’objet de railleries de la part de la communauté scientifique. La sensiblerie des antivivisectionnistes a été raillée par les médecins, les accusant de sensiblerie et de préférer les animaux aux humains. Ces moqueries allaient jusqu’à considérer la défense des animaux comme une pathologie mentale. C’est à cette époque que le mot « zoophilie » prend son sens péjoratif. La journaliste féministe Flora Tristan considérait que la défense des animaux était une forme d’oppression envers les hommes les plus faibles. Elle a dénoncé l’oppression des lois de protection sur les servants prolétaires auxquels les animaux étaient confiés et qui ne bénéficiaient pas d’autant d’attention. Le mépris de la sensiblerie est toujours observable de nos jours lorsqu’elle met une entrave à l’activité humaine. Les défenseurs des animaux sont l’objet de dérision, voire de stigmatisation et leur cause est minimisée.
Le Crapaud - Victor Hugo « (…) |
c) Les résultats obtenus
Les législations sur la protection animale ont contribué à adoucir les mœurs au XIXème siècle dans une société qui se pacifiait. Le militantisme des deux siècles passés a abouti a plus de législation sur la question animale. Elle a abouti à plus de règlementations et de normes tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Le statut juridique de l’animal est passé de « bien meuble » dans l’article 528, chapitre des biens du Code civil à « être sensible » par la loi de juillet 1976 du Code pénal qui interdit les actes de cruauté envers les animaux domestiques. En 2014, l’animal est passé du statut de « bien meuble » à celui d’« être vivant doué de sensibilité ». Il existe désormais une meilleure prise en compte morale de leur capacité à souffrir. Le bien être animal a été rationalisé au moyen de protocoles dans la façon de traiter et d’abattre les bêtes. On préconise « la fin des souffrances inutiles ». L’application des lois et des protocoles ne se fait pas toujours en raison des cadences imposées et de l’inapplicabilité de certaines lois comme la loi européenne interdisant le transport de veaux pendant plus de huit heures, le sont dans les faits sur une durée de plus de quarante heures. C’est cette réalité qui se retrouve diffusée par des associations comme L214. Le scandale de l’abattoir du Vigan avait entraîné sa fermeture pour inspection. En 2010, une série d’inspections avait mis en lumière les manquements aux protocoles pour lesquels des réformes avaient été lancées permettant de remettre les abattoirs français sur les rails. Même respectés, ces lois et ces protocoles ne suffisent pas à assurer un confort optimal car elles ne couvrent pas toutes les pratiques allant à l’encontre du bien-être animal. L’industrie agroalimentaire exige une exploitation toujours plus poussée de l’animal pour ses propres profits, mais aussi pour répondre à une demande croissante (enfermement des poules et des truies dans des espaces à peine plus grands qu’eux, etc). Répondre à la détresse animale ainsi créée exigerait encore plus de rationalisation de l’exploitation animale avec toujours plus de lois et toujours plus de règles. Le bien-être animal est pris en compte tant qu’il n’entrave pas l’utilité que l’homme moderne peut tirer de son exploitation. La Commission européenne s’est prononcée le 3 juin 2015 en faveur de la poursuite de l’expérimentation animale. À l’heure actuelle, aucune libération animale dans le sens de Regan n’est envisageable. La société contemporaine n’a jamais abandonné la traite animale pour le bien des animaux. Au mieux, la société établit une rationalisation de l’exploitation animale en vue de minimiser leurs souffrances. Peter Singer lui-même déclare dans la deuxième édition de son livre La libération animale que depuis la première parution de son livre, bien peu de choses ont changé. À cette rationalisation, il faut ajouter qu’il existe une forme de « spécisme » qui applique des lois à certains animaux et pas d’autres en fonction de notre rapport à chaque espèce. Alors que la mise à mort volontaire d’un animal de compagnie est passible d’une amende de 1500€, la mise à mort d’un animal d’exploitation est convenue mais doit mettre fin aux souffrances inutiles et depuis 2010, un décret a pour objet le « délit d’entrave à la chasse ». Cette compassion et cette indignation à géométrie variable démontre un anthropocentrisme déguisé. Dans le cas contraire, toute exploitation de l’animal qui lui serait nuisible aurait été interdite. La compassion étant par définition « Sentiment de pitié qui nous rend sensible aux malheurs d'autrui » (Larousse) ce qui est protégé chez l’animal est ce qu’il y a d’humain en lui. Jamais l’animal n’a donc été protégé pour lui-même.
1807 Code civil : « bien meuble » 1975 : Code pénal : « être sensible » 2014 : Code civil : « être doué de sensibilité » |
Animaux de compagnie : «blesser un animal ou entraîner sa mort volontairement est puni de 1 500 € d'amende (3 000 € en cas de récidive). Abattage : « Les locaux, les installations et les équipements des abattoirs doivent être conçus, construits, entretenus et utilisés de manière à épargner aux animaux toute excitation, douleur ou souffrance évitables. » (2003) Chasse : « Est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le fait, par des actes d'obstruction concertés, d'empêcher le déroulement d'un ou plusieurs actes de chasse » |
Article R214-71 « La saignée doit commencer le plus tôt possible après l'étourdissement et en tout état de cause avant que l'animal ne reprenne conscience. » Article R214-69 « I. - L'immobilisation des animaux est obligatoire préalablement à leur étourdissement et à leur mise à mort. La suspension des animaux est interdite avant leur étourdissement ou leur mise à mort. II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas : 1° Aux volailles et aux lagomorphes dans la mesure où il est procédé à leur étourdissement après leur suspension ; 2° Aux animaux dangereux mis à mort d'urgence dans l'enceinte d'un établissement d'abattage. » | Article R215-8 « I.-Est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe : 3° Le fait de procéder ou de faire procéder à une saignée dans des conditions contraires à l'article R. 214-71 ; 4° Le fait de ne pas immobiliser les animaux préalablement à leur étourdissement et, dans le cas de l'abattage rituel, préalablement et pendant la saignée ; 5° Le fait de suspendre un animal conscient, contrairement aux dispositions de l'article R. 214-69 ; 6° Le fait, en dehors des cas prévus à l'article R. 214-70, de ne pas étourdir les animaux avant leur abattage ou leur mise à mort ; » |
a) La situation actuelle de l’exploitation animale
Aujourd’hui, l’élevage traditionnel est marginal dans notre région du monde. Il n’est l’effet que de quelques petits exploitants qui les utilisent pour leur consommation personnelle. Dès qu’il s’agit de commercialiser leur production, l’abattage devient industriel. Il est le même qu’il s’agisse des abattoirs de grandes entreprises ou d’abattoirs labellisés. L’élevage et l’abattage industriels sont le modèle suivi par les sociétés développées. Avec l’émergence de nombreux pays en voie de développement, c’est ce modèle qui s’exporte et qui s’impose. Le tiers-monde est entré dans sa phase d’industrialisation : la Chine, l’Inde, le Brésil suivis par divers pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique du Sud qui sont en train de se régler sur le modèle alimentaire occidental. Là où le niveau de vie augmente, la consommation de viande explose, augmentant de façon exponentielle le nombre de consommateurs réguliers d’aliments carnés. Aujourd’hui, entre 50 et 60 milliards d’animaux sont tués chaque année pour être mangés. La FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) estime qu’en 2050, la consommation de viande aura doublé. La population mondiale connaît une explosion démographique qui contribue à augmenter le nombre de consommateurs de viande. Avec cette augmentation exponentielle de production de viande, il faudra, pour répondre à une telle demande, élever et tuer de plus en plus d’animaux à des cadences toujours plus élevées. Cette industrialisation devra se faire de façon institutionnalisée et banalisée. Nous l’avons vu, la rationalisation de l’exploitation animale permet seulement d’éviter des souffrances qui ne vont pas à l’encontre des besoins industriels. Ce modèle, une fois exporté dans des pays émergents, qui n’ont pas derrière eux plusieurs siècles de rationalisation animale devra à son tour, s’il veut éviter la souffrance animale passer d’un élevage et un abattage traditionnel à une production réglementée en l’espace de quelques années. Autrement dit, ils devront commencer à zéro d’autant plus que certains de ces pays comme la Chine n’ont pas du tout de tradition d’éthique animale. Pour répondre à la demande croissante en viande, il est nécessaire de nourrir les animaux en céréales. Aujourd’hui, les trois quart des terres agricoles servent à nourrir les animaux destinés à l’abattage et la moitié de la production agricole y est consacrée. Consacrer tant de produits issus de l’agriculture pour la donner aux animaux prive d’autres humains de l’accès à la nourriture et fait considérablement augmenter les prix. L’augmentation de prix a entrainé de nombreuses émeutes dans différents pays du monde. En janvier 2007, des Mexicains sont descendus dans la rue pour protester contre la flambée des prix. En effet, l’aliment de base des Mexicains, la tortilla a vu son prix augmenter de 40%. Tous ces besoins agricoles nécessitent de l’espace. Cet espace est obtenu par le défrichement. On estime que 70% de la déforestation mondiale est due à l’élevage. L’élevage nécessite de grandes quantités d’eau et représente à lui seul 70% de l’épuisement mondial d’eau potable. Produire autant nécessite du carburant. L’élevage pollue. L’élevage nécessite du carburant et notamment du pétrole, lequel n’est pas le seul qui une fois dans l’atmosphère fait augmenter l’effet de serre, les gaz émis par les immenses troupeaux de vaches ne sont pas à négliger. Répondre à une demande en viande exponentielle nécessite une exploitation des ressources exponentielles. Or, le renouvellement des ressources naturelles, lui n’augmente pas de façon exponentielle…
Cette exploitation toujours plus importante des ressources naturelles ne sera pas, bien évidemment sans conséquences sur l’environnement ni sans répercussions sur l’homme lui-même. En premier lieu, la production de viande entraîne directement trois grands types de problèmes : la pollution, la déforestation et l’épuisement des ressources.
La pollution, ce sont les nitrates, les pesticides et les nombreux produits chimiques employés par l’industrie agricole. Ce sont aussi les gaz à effet de serre rejetés dans l’atmosphère. Le CO2 rejeté par les véhicules et les machines agricoles et le méthane, rejeté par les vaches élevées en grand nombre. Ce dernier gaz a un potentiel de réchauffement global 25 fois supérieur au dioxyde de carbone. Le niveau atmosphérique du méthane est passé entre 2007 et 2008 de 25,4 millions de tonnes à 5,6 milliards de tonnes. Cette présence massive de gaz à effet de serre provoque un réchauffement du climat qui entraîne un dérèglement du cycle naturel des saisons dans différentes régions du monde. C’est ce réchauffement qui est responsable de la fonte des glaces et du permafrost, mais aussi de certaines catastrophes naturelles. La fonte du permafrost entraîne à son tour une nouvelle libération de gaz à effet de serre qui accélère le réchauffement climatique et la fonte des glaciers. La fonte des glaciers a pour conséquence de priver certaines espèces de leur habitat et de leur terrain de chasse naturels, les ours polaires en première ligne. Elle a aussi pour conséquence de faire monter le niveau des eaux et à modifier profondément l’environnement côtier. Cela va entraîner des catastrophes naturelles telles que les inondations, les vagues de chaleur et les sécheresses. Enfin, ces transformations climatiques, ainsi que la pollution auront un impact direct sur la santé humaine avec la transmission de maladies comme le paludisme et la dengue.
Les forêts sont ce qui permet de renouveler l’air qu’on respire. Elles seules sont capables de recycler le gaz carbonique émis dans l’atmosphère et de le transformer en oxygène. La forêt amazonienne est comme on l’entend si souvent, le poumon de la planète. Le WWF déclare que « près de la moitié de la forêt humide pourrait se transformer en paysage désertique d’ici 25 ans ». Non seulement la déforestation empêche l’air de se recycler naturellement, mais c’est tout un écosystème qui est détruit. La forêt protège de l’érosion du sol et une fois la forêt disparue, le terrain n’est plus propice à la réapparition d’une zone boisée. La forêt abrite tout un écosystème de faune et de flore qui se retrouve menacée de disparition. La disparition de certaines espèces entraîne la disparition d’autres espèces qui se retrouvent privées de leur nourriture ou qui prolifèrent faute de prédateur faisant à son tour disparaître des espèces. Au Brésil, le nombre d’espèces menacées a triplé en 15 ans. La liste des espèces qui y sont menacées n’en compte pas moins de 627. La déforestation entraîne la disparition de tout un écosystème. C’est un cercle vicieux.
L’épuisement des ressources entraînera des famines sur le long terme dues à plusieurs facteurs tels que la sécheresse, mais aussi au partage inéquitable des ressources. En effet, les pays du Nord peuvent produire en bien plus grande quantité que les pays du Sud : un hectare de céréales produit dix tonnes de grains en France contre 650 kg au Mali. Une fois sur le marché, cette grande quantité de produits agricoles fait baisser les prix et fait subir une concurrence déloyale aux paysans locaux qui ne peuvent plus vendre et n’ont pas les moyens financiers et juridiques de se défendre contre les multinationales qui rachètent leurs terres pour produire des légumes qu’ils revendront plus cher aux Européens. L’épuisement des ressources entraînera une hausse des prix des denrées alimentaires, c’est-à-dire crises économiques, disettes et famines. Face à ces prix qui augmenteront constamment, les plus pauvres seront les plus vulnérables. Pour les couches moyennes de la population, les familles verront leur budget alimentaire augmenter au détriment d’autres choses comme les loisirs. On peut imaginer que les lobbies de l’alimentation verront leur pouvoir grandir considérablement et seront capables d’exercer une pression plus forte sur les Etats.
Exporter notre modèle dans le reste du monde entraînerait un creusement des écarts des richesses entre les pays du Nord et les pays du Sud, entraînerait une traite animale toujours plus importante et une disparition de certaines espèces sauvages. Cela entraînerait des réactions en chaîne qui auraient des répercussions sur l’humanité. De ces réactions, nous pouvons en identifier dix principales : l’épuisement des ressources, la déforestation, la pollution, le réchauffement climatique, la disparition des espèces, les catastrophes naturelles, les maladies, les déplacements de population, les crises économiques et les famines.
Conclusion
Dans la société occidentale, l’animal a toujours été un objet d’exploitation, une matière première dont l’homme pouvait disposer selon ses besoins. Le motif qui historiquement a pu amener la prise en compte de la souffrance animale a été anthropocentrique. Cet anthropocentrisme s’est appuyé tout au long de l’histoire de la cause animale sur l’affection portée à l’animal d’où découle l’empathie. Faire souffrir un animal est mal car placé dans une situation similaire, nous souffririons autant que lui. L’animal ne peut être placé au-dessus de la liberté qu’a l’homme d’en disposer à sa guise (à moins de remettre en cause l’anthropocentrisme en profondeur et tous les aspects qui en découlent). En ajoutant à cela la souffrance humaine que l’exploitation animale engendre, les motifs anthropocentriques s’avèrent les plus pertinents dans le cadre actuel pour répondre à la souffrance animale. L’hypothèse de la libération altruiste de l’animal n’est à ce jour pas envisageable. Elle ne l’est qu’à condition que l’homme en retire un bienfait. En revanche, le système pourra s’appuyer sur les mouvements abolitionnistes pour promouvoir ses nouvelles positions de la même manière que depuis la fin du XIXème siècle il s’appuie sur la compassion populaire pour promouvoir une plus grande rationalisation de l’exploitation animale. Les mouvements abolitionnistes de la cause animale en eux-mêmes sont voués à rester marginaux et à être instrumentalisés par le système pour en venir à ses fins. Quelle sera la place de l’animal au sein de la société occidentale, seul l’avenir pourra en décider. Cependant, des solutions telles que la fabrication de viande artificialisée ouvrent une nouvelle porte en direction du transhumanisme. Les autres solutions actuellement envisageables comme la consommation d’insectes ou le végétarisme amèneront des transformations profondes de la civilisation de la même façon que la domestication et l’élevage ont été une avancée civilisationnelle à la préhistoire, ainsi que l’entrée dans l’aire industrielle de la nourriture. Redéfinir le rapport de l’homme à l’animal et à sa nourriture c’est repenser notre société, mais c’est aussi se demander quelle humanité nous serons demain.
Sources :
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P. Singer, La libération animale, Paris, Payot, 2012 (1re éd., 1975)
R. Descartes « Cinquième partie » Discours de la méthode, Livre de Poche, 1re éd. 1637
C. Larrère, dir. J Birnbaum « Des animaux machines aux machines animales », Qui sont les animaux ?, Saint-ArmandGallimard, 2010
A. Caron « Parce que la viande détruit la planète », No Steak, Paris, J’ai Lu, 2013
F. Burgat, « La mouvance animalière. Des « petites dames de la protection animale ». À la constitution d’un mouvement qui dérange », Pouvoirs 4/2009 (n° 131) , p. 73-84
URL : www.cairn.info/revue-pouvoirs-2009-4-page-73.htm.
DOI : 10.3917/pouv.131.0073.
Journal officiel du 6 juin 2010
P. Le Hire, « 3 000 km, sans boire ni sans manger. Le supplice de jeunes veaux destinés à l'abattoir », Le Monde, 19 aout 2016
CNRS Le journal 3 000 km, sans boire ni sans manger. Le supplice de jeunes veaux destinés à l'abattoir – Le Monde, 19 aout 2016
M. Bane, « Pourquoi la recherche animale reste indispensable » CNRS Le Journal, 2015
« Quelles sont les sanctions en cas de maltraitance sur un animal ? », Service-publique .fr, 2015
« Methane : gaz à effet de serre », Vedura.fr
« Conséquences du réchauffement climatique », Vedura.fr
« Brésil : les espèces en voie de disparition ont triplé en 15 ans », Lapresse.ca, AFP, 2008
« Changement climatique et santé humaine », globalchange «Il propose d'utiliser des poulets sans cervelle dans l'élevage de masse», CitizenPost, 2014