Monsieur Déry était un homme comme les autres. Un homme charmant, honnête, avec une femme charmante et un bébé. Il s'appelait Jules. Monsieur Dry était banquier. C'était un homme des plus normaux, Monsieur Toulemonde, quoi. Sauf qu'il était malchanceux. C'est souvent aux gens normaux qu'il arrive des problèmes. Mais il ne le sait pas encore. Il gara sa voiture et sortit pour aller tirer de l'argent juste en face. Il n'en avait que pour une minute. Il laissa sa clef sur le contact avec son fils sur la banquette arrière. Il n'en avait pas pour longtemps, ils ne risquaient rien... du moins c'est ce qu'il croyait.
Sébastien était un voyou des banlieues. Il avait la vingtaine Il s'était retrouvé plusieurs fois devant le tribunal pour vol ou dégradation. Ses parents, exaspérés, l'avaient mis à la porte à dix-huit ans. Il fut alors contraint à voler pour vivre. Il aurai pu trouver du travail mais il n'avait pas le bac en poche et il était, aux dire des gens du quartier, un bon à rien. De plus les éventuels employeurs le connaissaient de réputation. Il fréquentait une bande dans laquelle ils arboraient tous coiffures punk,
blousons de cuir, piercing et tatouages.
Aujourd'hui, en vagabondant dans les rues, il aperçut une mercedes en bon état. En changeant la plaque d'immatriculation il pourrait en tirer un bon prix. Il regarda aux alentours. Personne. Il se précipita sur la voiture. Miracle! La clef était sur le contact. C'était vraiment son jour de chance. Il s'installa et démarra. Monsieur Déry eut juste la surprise de voir sa voiture s'enfuir avec son fils à l'intérieur.
Sébastien roulait à vive allure à travers les rues. Il se dirigeait vers un entrepôt abandonné où lui et sa bande avaient l'habitude de déposer des objets volés ou de la drogue. Il gara la voiture là où il y avait de la place, parmi les télévisions, les sacs de drogue et autres voitures volées. Il s'apprêtait à quitter la voiture quand il entendit un bruit à l'arrière de la voiture. Il se retourna eut la surprise de trouver sur la banquette arrière un bébé d'environ un an à l'air calme en train de sucer sa tétine en le regardant. Il resta bouche bée, devant sa bouille d'ange : des cheveux courts blonds avec une petite houppette et des yeux bleus. Jules enleva sa tétine de sa bouche et sourit en tendant sa main vers lui.
Sébastien le prit dans ses mains et le souleva après l'avoir détaché de son siège bébé. Il continuait à le regarder béa. Jules rit. Il se demandait bien ce qu'il allait en faire. Le rendre à ses parents? Impossible, il ne connaissait pas leur adresse. L'amener à la police? Et puis quoi encore? Il allait se faire arrêter! Surtout qu'il avait un casier judiciaire. Et avec sa tête ils soupçonneraient qu'ils ne l'avaient pas trouvé abandonné. L'abandonner? Il serait condamner pour vol aggravé. Il le garderait chez lui en attendant de prendre une décision. Il l'emmena dans dans son modeste appartement désordonné et poussiéreux et le posé sur son lit défait. Il s'accroupit en face de lui en le fixant.
« Qu'est-ce que je vais faire de toi? … Comment tu t'appelles, d'abord, tu dois avoir un nom... Voyons voir ». Il s'assit sur son lit et pris le bébé sur ses genoux. Il se mit en tête de chercher un nom sur ses vêtements. Le tournant et le retournant malgré les protestations du bébé il finit par trouver une étiquette sur son col. « Ah tu t'appelles Petit Bateau! ». Il le souleva à hauteur de son visage de l'air de quelqu'un qui vient qui vient de découvrir la huitième merveille du monde. Le bébé le regardait d'un air grave. « Au fait, tu es une fille ou un garçon? Voyons voir... un garçon! En même temps, habillé en bleu, on aurait pu se douter que tu es un garçon ». Il le posa sur son lit et l'observa se promener sur le lit en rampant. Il posa le sommet de son crâne sur le lit, tendit ses jambes et et fit une galipette ratée et retomba sur le côté. Il se redressa et à quatre pattes se mit en quête d'exploration du lit.
Jules pleurait depuis une dizaine de minutes et Sébastien avait déjà tout essayé : du gigot d'agneau, des brocolis, de la bière... et sa couche était propre, il l'avait reniflée, elle ne sentait pas mauvais. Il eut soudain révélation : du lait! Il fallait qu'il achète du lait. Il courut à l'intermarché le plus proche. Il prit un pack de lait et un biberon. En rentrant, il remplit le biberon et l'enfonça doucement dans la bouche du nourrisson. Il s'arrêta de hurler quelques secondes et repris de plus belle. « Quoi encore? Tu veux que je te le fasse chauffer? ». Sébastien était exaspéré. Il l'aurait volontiers attrapé par la peau du cou pour le jeter par la fenêtre. Ce petit ange se serait forcément débrouillé avec ses ailes!
Il reprit la patience patience dont il avait tant besoin et attrapa une casserole dans laquelle il vida le biberon. Quand le lait fut à point, il le versa dans le biberon et l'enfourna dans la bouche de Jules en priant pour qu'il l'accepte cette fois-ci Miracle, le nourrisson se calma et but jusqu'à, la dernière goutte. Il l'installa sur un tas de couvertures prises dans un placard. Le bébé s'endormit et Sébastien, épuisé par cette journée baby-sitting, s'écroula sur son lit et s'endormit également. Son répit fut de courte durée. Sébastien fut brusquement réveillé. Il faisait encore nuit. Il se rendit compte que ce qui l'avait réveillé étaient les pleurs du bébé. Il se leva à contrecœur et prit « Petit Bateau » dans ses mains. « Qu'est-ce qu'il y a, encore? Il est où le bouton pour l'éteindre? ». Jules s'arrêta de pleurer, devint tout vert et sa bouche se tordit. Sébastien eut juste le temps de l'emmener au-dessus de l'évier dans lequel il régurgita le lait, qui agacé par tous ces aller-retours, s'enfuit dans les canalisations. Il lui rinça la bouche et le regarda. « Qu'est-ce qu'il faut que je fasse? Et pourquoi moi? Tu as été envoyé par le diable pour me pourrir la vie? Pour me punir? » Il le prit dans ses bras et Jules se blottit contre lui, s'endormant en suçant son pouce.
Quelle était donc cette odeur? Cela sentait comme dans une décharge. La poubelle était vide, il venait d'aérer mais ça puait toujours. Cela sentait comme... Comme une couche de bébé! Il prit le bébé (qui s'était déjà remis à pleurer) et renifla sa couche. Il comprit alors qu'il avait besoin d'être changé. Le changer! Il n'avait pas acheté de couches hier soir! Il devait aller en acheter immédiatement. Mai si il y allait tout de suite il laisserait le bébé mijoter dans sa... Hem hem, restons polis. Il allait d'abord le laver et ensuite il irait acheter de couches. Il se munit de gants et d'une pince à linge qu'il se mit sur le nez et prit son courage d'une main et du papier toillette et un éponge de l'autre. Il jeta la couche à la poubelle, essuya le derrière de Jules et finit de le laver dans l'évier avec l'éponge. Il le posa sur le lit et courut acheter des couches.
Son portable sonna. C'était Eric, qui lui demandait de l'aider à livrer de la drogue. Il accepta. Ils se donnèrent rendez-vous dans l'entrepôt. Sébastien s'apprêtait à quitter son appartement mais une fois arrivé devant la porte, il s'arrêta. Il se retourna et vit le bébé assis sur son lit d'un air de dire « et tu compte me laisser seul ici tout ce temps ? ». Il avait raison, ça risquait de durer un certain temps, il ne rentrerait peut-être que dans la soirée. Il ne pouvait pas le laisser là. Mais quelle serait la réaction d'Eric à la vue du bébé? Il décida néanmoins de le prendre avec lui.
Quelle ne fut pas la surprise d'Eric en arrivant! Il vit Sébastien accroupi en face d'un bébé assis sur un sac de drogue, gazouillant et le chatouillant pour l'amuser.
-C'est quio ça?
-Un bébé.
-Je le vois bien que c'est un bébé
-Alors pourquoi tu demandes?
-D'où il vient? C'est ton ex qui te l'a refilé?
-Non. Il était dans la voiture que j'ai volée.
-Pourquoi tu l'as pas jeté par la fenêtre?
Sébastien fut choqué par la question d'Eric.
-Je l'avais pas vu tout de suite. Je l'ai remarqué qu'après avoir garé la voiture.
-Alors pourquoi tu t'en es pas débarrassé?
-M'en débarrasser comment, répondit-il sur un ton irrité.
-Je sais pas, tu le laisses dans un coin et tu t'en vas.
-T'es pas fou? Abandonner un bébé?
-Quoi? Et alors? Après toutes les conneries que t 'as faites c'en est pas une de plus ou de moins qui fera la différence.
-Oh arrête. Grouillons-nous, on est en retard. Aide-moi plutôt à charger les sacs dans le coffre.
Ils s'exécutèrent sur-le-champ et quand ils eurent fini, embarquèrent.
-Tu comptes quand même pas l'emmener?
-Tu veux que j'en fasse quoi?
-Je te préviens : il chiale je le balance par la fenêtre.
A un feu ils furent repérés par un policier. Il s'avança vers eux d'un air soupçonneux. Eric et Sébastien commencèrent à paniquer. Il frappa la vitre de sa phalange, leur faisant signe d'ouvrir. Ils retinrent leur respiration et Sébastien baissa sa fenêtre. Le policier aperçut alors le bébé.
-Alors, Messieurs, on fait du baby-sitting?
-Oui répondirent-ils en cœur.
-C'est bien de voir des jeunes s'occuper d'un bébé, ça apprend les responsabilités. Avec tous ces voyous qui trainent dans le quartier, la police ne sait plus où donner de la tête. Je vois que tous les jeunes gens ne sont pas comme ça. Au revoir Messieurs.
Eric et Sébastien échangèrent un regard et et regardèrent le bébé qui venait malgré lui de les extirper d'une situation délicate. Ils reprirent la route tandis que Sébastien continuait de contempler Jules d'un air rêveur.
Jules avait grandi. Il avait maintenant onze ans et c'était maintenant un pick-pocket accompli. Jules et Sébastien avaient vécu bien bien des péripéties. Sébastien le considérait maintenant comme son fils. Il lui avait appris l'art du vol sous toutes ses formes et les principes de base du commerce de marijuana. Il n'allait pas à l'école, elle pourrait le ramener dans le droit chemin et puis c'était une perte de temps. Il lui avait appris à lire lui même. Il fréquentait les enfant du quartier. Il passait la plus grande partie de son temps dehors. Il y avait souvent des bagarres dans la rue mais il se débrouillait très bien en self-défense. Il l'assistait dans son travail, c'était un très bon assistant promis à un grand avenir de dealer ou de voleur de diamants.
Sébastien fut tiré de sa rêverie par Eric lui disant qu'ils étaient arrivés à destination. Sébastien sortit de la voiture et posa le bébé à sa propre place. Ils étaient arrivés devant une villa perdue en pleine campagne. Le type qui y habitait avait fait fortune en dealant. Il faisait venir de la drogue directement de Colombie et la redistribuait directement dans toute la France. Il avait pu se payer d'excellents avocats, c'est pourquoi il avait réussi à faire fortune sans se faire attraper. C'était un homme plutôt costaud vêtu d'habits de marque. Il portait une barbe grisonnante de quelques jours. Il leur sera la main cordialement et leur proposa à boire. Ils acceptèrent volontiers.
Son intérieur était assez luxueux mais pas kitch. Une décoration moderne avec des appareils de luxe. Une télévision à écran plat, un ordinateur dernier cri, des plaques électriques dernier cri avec une vitre pardessus pour un nettoyage plus facile. Ils parlèrent affaires et leur tendit une mallette pleine de billets.
Une fois de retour à l'entrepôt ils partagèrent l'argent « Regarde-moi tous ces biftons » Dit Eric en les agitant devant le visage de Sébastien. « Une partie pour moi, une partie pour toi et le reste pour les potes ».
Un jour dans la rue il passa devant une affiche sur laquelle il reconnut la photo de Jules. Il lut : « Recherche Jules, volé avec une mercedes immatriculée... » Il ne finit pas sa lecture et partit en courant tant il fut surpris et effrayé de voir l'avis de recherche du bébé qu'il avait dans ses bras.
Il s'arrêta dans sa course, une idée venait d'illuminer son esprit. Il allait enfin pouvoir s'en débarrasser! Il changea de direction, décidé à se rendre au commissariat de police. Arrivé devant le commissariat il s'arrêta. Il hésitait. Il regardait Jules dont il connaissait désormais le prénom. Devait-il vraiment entrer? Il se ferait arrêter. Et puis maintenant, il hésitait à s'en séparer. Cela faisait maintenant un mois qu'il était avec lui. Il était devenu maître dans l'art de préparer un biberon. Pourtant, il fallait bien qu'il retourne chez ses parents un jour, c'était prévu. Qu'en ferait-il si il le gardait? De toute façon, il commençait à se faire tard. Il allait bientôt être l'heure de son biberon. Il fit demi-tour pour rentrer chez lui. Il pénétra dans l'appartement d'où se dégageait une odeur de lessive. Il était maintenant propre et rangé. Il prépara un bain à bonne température, puis, une fois lavé, ill fit chauffer du lait « éveil de lactel » et le donna à Jules dans son biberon.
Enfin, il le coucha dans son lit qui se trouvait dans un coin qu'il lui avait aménagé. Il avait beaucoup appris sur l'art de s'occuper d'un bébé en l'espace e ses quelques jours. Il avait parcouru beaucoup de chemin depuis le jour où il lui avait proposé de la bière à boire et qu'il l'avait refusé catégoriquement. Aujourd'hui, il en riait. Aussitôt il se dit que si ses parents le voyaient, ils ne le reconnaîtraient pas.
Un jour qu'il était en train de compter l'argent qu'il venait de gagner., Jules tenta de se lever sur ses deux pieds. Il dut s'y reprendre à plusieurs fois. Une fois en équilibre il tenta d'avancer un pied, puis l'autre. Sébastien l'observait. Il avançait un pied après l'autre avec prudence. Puis, satisfait, il continua de plus en pus vite, trébucha et s'affala de tout son long sur la couverture qui trainait à moitié. Sébastien courut le relever. Ce spectacle d'un bébé qui faisait ses premiers pas le surpris et l'émut.
Soudain, la porte s'ouvrit en claquant et des policiers entrèrent et braquèrent leurs armes sur lui en criant « les mains en l'air on ne bouge plus ». Ils le forcèrent à s'allonger par terre et lui passèrent les menottes. Il eut droit au traditionnel « vous-avez-le-droit-de-garder-le-silence-tout-ce-que-vous-direz-poura-être-retenu-contre-vous-le-jour-du-procès » pendant qu'on le conduisait au commissariat.
« Trafic de drogue, vol de voiture et kidnapping » énonçait l'inspecteur de police. Sébastien continuait à fixer ses pieds comme si ils pouvaient lui apporter le salut. Un médecin examinait Jules pour y déceler des traces de mauvais traitements. Il n'osait pas lever les yeux vers les parents. Soudain, il entendit une porte s'ouvrir. Il leva les yeux et et le médecin apparut avec Jules dans les bras. Il annonça « aucune trace de maltraitance. Il n'est pas affamé. C'est un bébé en pleine forme. En plus il est propre ». La vue de ses retrouvailles entre Jules et ses parents lui arracha une larme. Tout rentrait dans l'ordre. Jules retournait dans sa famille et lui en prison. Il le regarda s'éloigner avec tristesse. Jules dans les bras de sa mère continuait de le regarder puis détourna les yeux et regarda devant lui.
C'est à ce moment là qu'il se fit une promesse : la promesse qu'à sa sortie de prison il se mettrait à chercher un vrai travail, un femme avec qui il fondrait une famille.
-EPILOGUE-
Sébastien fut condamné à dix ans de prison. A sa sortie, il coupa sa crête pour arborer une coiffure correcte. Il passa son bac avec succès et devin éducateur pour jeunes délinquants. Il rencontra Alice. Ils se marièrent et eurent un fils. Ils l'appelèrent Jules.
-FIN-